JIM.fr : quand on tort les résultats d'un sondage.

JIM.fr, le site spécialisé dans la santé pour les professionnels de la santé vient de publier un article qui analyse les résultats d'un sondage fait sur ce même site.
Et voici le titre grandiloquent de cet article : "Exclusif : la majorité des professionnels ne recommandent pas la vapoteuse pour le sevrage tabagique "

Damned. Lisons donc cette analyse afin de savoir ce dont il en retourne. Croyez-moi, cela vaut le détour.  C'est amusant, mais, en même temps, assez édifiant de la façon de procéder de certains médias.

Déjà, on se rend compte qu'il s'agit d'un sondage fait en ligne sur le site JIM.fr. Cela ne concerne donc pas tous les professionnels de la santé mais seulement les lecteurs inscrits sur ce site. Qui plus est, comme tous les sondages en ligne, n'ont répondu que ceux qui voulaient, bien entendu. Ce n'est donc pas une enquête approfondie, ce n'est pas non plus un sondage avec des échantillons représentatifs. C'est un sondage en ligne comme il en existe des milliers peut-être. Non pas que cela ne soit pas intéressant et que cela ne donne pas une tendance qui mérite qu'on s'y attarde, loin s'en faut. Mais ce n'est pas la vérité absolue. Affirmer que "la majorité des professionnels de la santé" ne recommandent pas la vape est donc faux lorsque 676 volontaires totalement au hasard ont répondu sur 1 228 000 recensés en 2019 (cf. cet article).

Ensuite, parmi les réponses, il y a des médecins, des infirmiers et des pharmaciens. JIM.fr note tout de même que les pharmaciens ne sont pas en majorité les plus farouches défenseurs de la vape. Tu m'étonnes, ils n'en vendent pas.   Pourquoi un pharmacien ou une pharmacienne irait dire à un patient : "je vends des patchs ou des gommes mais allez plutôt au magasin de vape en face." ?

Voici comment JIM présente la chose :

"On notera une différence assez marquée chez les pharmaciens qui sont plus fréquemment réticents à l’idée de recommander la cigarette électronique que les autres professionnels (53 % vs 40 % chez les médecins et 45 % chez les infirmières), ce qui s’explique peut-être (penseront les mauvaises langue) par le fait que leurs officines vendent des substituts et non des vapoteuses."

Oups pardon. Penser naïvement qu'il est somme toute normal que les pharmacies conseillent à leurs clients ce qu'elles vendent c'est être une mauvaise langue. Promis, JIM, je ne recommencerai plus !

Ensuite, ce n'est pas spécialement le rôle des infirmiers et infirmières de conseiller un traitement. Ils peuvent bien entendu, mais ce n'est pas leur tâche principale.

Poursuivons.

JIM.fr n'est pas totalement malhonnête, et c'est là le drame pour lui et source d'amusement pour nous. Il va donner le graphique des résultats :



Déjà, on notera  que 7% des répondants ne savent pas ou ne se prononcent pas sur le fait de conseiller ou non la vape. Peut-être ont-ils répondu un lendemain de cuite pour ne pas savoir et ne pas se rappeler. Et c'est quand même environ 47 des votants. Ce n'est pas rien tout de même ces participants avec des trous de mémoire. Cela m'a beaucoup amusé Surtout que la question est simple, presque binaire : "vous conseillez la vape ou non ?". Si la question était plus difficile, style : "pensez-vous qu'il soit pertinent pour un professionnel de santé de conseiller la vape ?", je pourrais comprendre que certains hésitent à répondre de façon binaire oui/non.

Ensuite, si on regarde les chiffres, on se rend compte qu'il y a soit un petit problème de français, pas impossible lorsqu'on écrit "des mauvaises langue", soit un petit problème de maths.

En effet, si on additionne les catégories "oui" à la question "conseillez-vous la vape", c'est sans appel : 20+16+16, soit 52%. 52% des professionnels de la santé ayant répondu à ce sondage conseillent la vape selon les situations. Rappelons que parmi ces 52%, il y a les pharmacies, pas spécialement les plus enthousiastes à l'idée de vous conseiller un bon clearomiseur. Ni les mieux armées pour cela, d'ailleurs.

Ou alors, il faut écrire un titre style "la majorité de nos lecteurs ne recommandent pas la vape en première intention". En effet, si on additionne les réponses "non" (42%) et ceux qui ne conseillent pas la vape sans que d'autres méthodes n'aient pas été essayées au préalable (20%), alors on a effectivement une belle majorité de 62%.
Évidemment, un tel titre n'est pas super sexy, j'en conviens. Mais on serait quand même plus proche de ce que ce sondage semble vouloir dire.

Bonne lecture et bonne vape !